Quelques mois après son
embauche, une avocate salariée se voit reprocher par sa hiérarchie une
très nette insuffisance professionnelle. Une rupture conventionnelle
lui est alors suggérée avec insistance. Dans un premier temps, la jeune
femme accepte cette proposition. Puis, estimant qu’on lui a forcé la
main, elle réclame devant les tribunaux la requalification de son
départ négocié en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Tour à
tour, la cour d’appel puis la Cour de cassation lui donnent raison (1).
La réponse de l’avocat :
(1) Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-13.865.
Capital
La réponse de l’avocat :
On
le sait sans doute, la rupture conventionnelle est un dispositif qui
permet à un employeur et à un salarié de se quitter d’un commun accord.
Créée en 2008, cette mesure a vite séduit par ses avantages. Côté
entreprise, plus besoin de trouver un motif réel et sérieux pour rompre
un CDI, comme dans une procédure de licenciement. De plus, les
indemnités à verser se limitent généralement au minimum légal ou à ce
que prévoit la convention collective. Quant à la personne désirant
partir, elle va bénéficier des allocations chômage, ce qui constitue une
alternative sécurisante à la démission. Enfin, la procédure est simple à
mettre en œuvre : il suffit de cosigner un formulaire type, puis de
l’envoyer à l’administration. Tout serait-il idéal ? En réalité, non.
Des entreprises ont vu là une solution facile pour se séparer de
certains collaborateurs. Quitte à les «pousser» un peu à accepter.
Or
le Code du travail précise que la rupture conventionnelle ne peut être
imposée par l’une ou l’autre des parties (art. L.1237-11). Comment
évaluer si les limites ont été dépassées ? Avec cet arrêt, la Cour de
cassation adopte une position assez subtile. Pour elle, un conflit entre
un employeur et l’un de ses salariés ne suffit pas, à lui seul, à
rendre caduque la rupture conventionnelle signée par la suite. Qui dit
litige ne dit pas forcément que l’employé a accepté de partir sous la
contrainte. En revanche, toute pression, telle que des reproches, des
intimidations ou encore du harcèlement, est proscrite. Encore faut-il
que le plaignant puisse le prouver. Dans notre affaire, cela n’a pas été
difficile pour la jeune femme. Elle avait reçu des courriers bien
maladroits de son cabinet, lui signifiant qu’un licenciement serait
préjudiciable à la suite de sa carrière…