jeudi 2 décembre 2010

Avantages en nature et frais professionnels du dirigeant

Frais professionnels sous haute surveillance
Qu'il soit entrepreneur individuel, commerçant ou artisan, professionnel libéral ou qu'il dirige une société, le chef d'entreprise est régulièrement amené à engager des dépenses professionnelles. Dès lors qu'elles sont strictement inhérentes aux besoins de son activité, ces dépenses constituent des charges déductibles du résultat de l'entreprise. Dans les sociétés, elles sont remboursées au dirigeant en franchise de cotisations sociales.
Compte tenu de ce régime de faveur, la tentation est parfois grande de « gonfler » un peu les notes de frais et de « faire passer » sous cette forme des dépenses en réalité personnelles du dirigeant. Prudence toutefois : il ne sera pas facile d'échapper à la vigilance du fisc et de l'URSSAF qui, en cas de contrôle, épluchent scrupuleusement ce poste de dépenses et n'hésitent pas, le cas échéant, à opérer des redressements. Nous détaillons dans les pages suivantes les règles applicables aux déplacements du dirigeant et à ses frais de restauration.

Savoir profiter d'avantages en nature
De quoi s'agit-il ? Le dirigeant bénéficie d'un avantage en nature quand son entreprise lui permet de réaliser une économie en supportant à sa place certaines de ses dépenses personnelles, par exemple :
- le dirigeant utilise gratuitement à des fins privées un bien de la société (véhicule de fonction, téléphone portable...) ;
- la société supporte des frais qui auraient normalement incombé au dirigeant (ex. : voyage, notes personnelles de restaurant ou d'hôtel, prise en charge d'une prime d'assurance) ;
- la société fait profiter le dirigeant d'un bien qu'il aurait payé plus cher sur le marché (ex. : logement, nourriture, remise de produits de l'entreprise).
Des avantages qui doivent être autorisés. En tant que tels, les avantages en nature constituent un complément de rémunération et doivent donc à ce titre être autorisés dans les mêmes conditions que la rémunération principale à laquelle ils se rattachent. Ainsi, soit l'avantage est attribué en complément de la rémunération du mandat social (fixée à la majorité par l'assemblée générale des associés dans les SARL), soit au titre d'un contrat de travail en cas de cumul de fonctions et il faudra alors respecter la procédure spéciale des conventions réglementées.
Un avantage soumis à cotisations. L'avantage en nature donne lieu à cotisations sociales, salariales et patronales. Il doit figurer sur la fiche de paie et entre dans la base de calcul de la taxe sur les salaires, pour les entreprises qui y sont soumises.
Un revenu imposable pour le dirigeant. Les avantages en nature sont soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu selon les règles des « Traitements et salaires » pour les dirigeants affiliés au régime général de la sécurité sociale (gérants minoritaires ou égalitaires de SARL, président de SAS ou de SASU, président et directeur général d'une SA) ou dans la catégorie « Article 62 du CGI » pour les gérants majoritaires de SARL ou gérants associés uniques d'EURL. Toutefois, si le montant de l'avantage en nature est excessif, le surplus est alors imposé en tant que « Revenus des capitaux mobiliers » sans bénéfice de la déduction de 10 %.
Une charge déductible pour la société. L'avantage en nature et les cotisations patronales qu'il engendre sont déductibles du résultat imposable de la société, sauf si leur montant est excessif. Dans ce cas, le « surplus » est réintégré dans la base imposable et soumis à l'IS assorti des pénalités. Pour faciliter les contrôles par le fisc et l'URSSAF, les avantages en nature doivent être récapitulés sur un état spécial annexé à la comptabilité et, pour les personnes les mieux rémunérées, figurer sur un relevé détaillé des frais généraux.

Avantageux, mais moins que pour les salariés
Sur le plan fiscal. Les avantages en nature accordés au dirigeant sont normalement évalués à leur valeur réelle. La situation du dirigeant à cet égard est donc moins avantageuse que celle d'un salarié « ordinaire ». Toutefois, pour les gérants minoritaires et égalitaires de SARL et les dirigeants de SAS, l'avantage en nature correspondant à l'utilisation privée d'un véhicule et aux outils issus des NTIC peut être évalué forfaitairement comme pour les salariés selon les règles prévues en matière sociale. De même, si ces personnes cumulent de façon régulière un mandat social avec un contrat de travail, les avantages nourriture et logement peuvent donner lieu à une évaluation forfaitaire
Sur le plan social. L'avantage en nature donne lieu à cotisations sociales. Quel que soit le statut du dirigeant, une évaluation forfaitaire de l'avantage logement et nourriture est admise si le dirigeant cumule son mandat social avec un contrat de travail et si l'avantage est octroyé au titre de ce contrat. À défaut de contrat de travail, ces avantages en nature doivent être évalués pour leur montant réel. L'avantage en nature véhicule ou outils issus des NTIC peut être évalué selon les barèmes officiels pour les dirigeants affiliés au régime général de la sécurité sociale, même s'ils n'ont pas de contrat de travail.
À chaque avantage en nature, son mode d'évaluation. S'agissant des barèmes officiels admis par l'URSSAF, ils sont publiés chaque mois dans la rubrique « chiffres utiles ».

Matériels issus des nouvelles technologies
L'usage par le dirigeant à des fins privées de matériels issus des NTIC (ordinateur, téléphone portable, smartphone) mis à disposition par son entreprise constitue un avantage en nature imposable et soumis à cotisations. Cet avantage peut être évalué soit sur la base de la dépense réelle, soit sur la base d'un forfait annuel estimé à 10 % du coût d'achat du bien ou, le cas échéant, de l'abonnement TTC. L'administration tolère toutefois que l'avantage en nature soit négligé lorsque :
- l'usage privé se limite à une utilisation raisonnable pour les besoins ordinaires de la vie quotidienne et familiale (ex. : courte durée d'appel au domicile, consultations de serveurs pratiques sur Internet) ;
- l'utilisation de technologies portables découle d'obligations professionnelles, notamment la possibilité d'être joint ou d'émettre des informations à tout moment.

jeudi 4 novembre 2010

Un nouveau statut : l'EIRL

L'EIRL, un nouveau statut au 1er janvier 2011
Permettre à un entrepreneur individuel de protéger son patrimoine personnel, sans avoir à créer de société, est l'atout majeur du statut de l'entrepreneur à responsabilité limitée.


Dès le 1er janvier prochain, l'entrepreneur individuel qui crée ou qui exerce déjà une activité commerciale, artisanale, libérale ou agricole pourra adopter le statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL). Ce statut sera ouvert aussi aux auto-entrepreneurs.
Mise à l'abri du patrimoine
Actuellement, l'entrepreneur individuel est responsable de ses dettes professionnelles sur la totalité de ses biens. S'il fait faillite, il risque de tout perdre. Il a néanmoins la possibilité de protéger son domicile et tous ses biens immobiliers personnels en les rendant insaisissables par une déclaration établie par un notaire.
Ou alors, pour protéger son patrimoine privé, il doit créer une société, notamment une EURL ou une SASU, qui a son propre patrimoine, seul gage des créanciers professionnels. Le patrimoine personnel du chef d'entreprise ne peut alors être atteint qu'en cas de faute de gestion ou encore, situation fréquente, lorsque le dirigeant s'est porté caution personnelle d'une dette de la société.
En devenant un EIRL, l'entrepreneur mettra à l'abri de ses créanciers professionnels ses biens personnels puisqu'il affectera à son activité professionnelle un patrimoine dédié, séparé de son patrimoine privé. Ce patrimoine affecté sera alors le seul gage de ses créanciers professionnels. Et il ne sera pas obligé de créer une structure ayant la personnalité morale, notamment une société.
Affectation du patrimoine
L'entrepreneur individuel constituera son patrimoine professionnel par le dépôt d'une déclaration d'affectation, selon la nature de son activité, auprès du registre du commerce et des sociétés (commerçant), du répertoire des métiers (artisans) ou du greffe du tribunal de commerce (agents commerciaux, professionnels libéraux ou auto-entrepreneurs). Hormis les éventuels honoraires du notaire et/ou de l'expert-comptable, la formalité est elle-même gratuite si elle est accomplie simultanément à la création de l'entreprise.
Cette déclaration comportera notamment un état descriptif des biens affectés (nature, qualité, quantité et valeur).
Composition du patrimoine affecté. L'entrepreneur devra tout d'abord identifier les biens qu'il va affecter à son patrimoine professionnel. Ce patrimoine pourra être composé de biens, de droits, d'obligations et de sûretés dont l'entrepreneur est propriétaire ou titulaire. Il comportera des biens nécessaires à l'activité professionnelle, tels qu'un terrain, un fonds de commerce, des machines, de l'outillage, une marque, les droits d'exploiter un brevet. Il pourra aussi inclure des biens non indispensables mais utilisés pour les besoins de l'activité professionnelle, notamment des biens à usage mixte (une partie du domicile ou un véhicule). Les biens purement personnels ne feront pas partie du patrimoine affecté.
À retenir : un même bien ne pourra être affecté qu'à un seul patrimoine professionnel. Et jusqu'à janvier 2013, l'entrepreneur ne pourra déclarer qu'un seul patrimoine affecté. Mais en revanche, le patrimoine affecté pourra concerner plusieurs activités professionnelles (commerciale et artisanale, par exemple).
Évaluation des biens. Elle est réalisée par l'entrepreneur lui-même sauf s'il s'agit d'un bien immobilier (évaluation par un notaire et publicité au bureau des hypothèques) ou d'un bien d'une certaine valeur à fixer par décret (évaluation par un professionnel, un expert- comptable par exemple).
Attention : en cas de surestimation, par l'entrepreneur, d'un bien affecté, il sera responsable de ses dettes professionnelles, pendant 5 ans, sur la totalité de son patrimoine, professionnel et personnel, pour la différence entre la valeur réelle des biens lors de l'affectation et la valeur surestimée déclarée.
Droits limités des créanciers
Grâce à la déclaration d'affectation, les créanciers sont informés avec précision de la valeur du patrimoine qui constitue leur garantie.
Les créanciers professionnels dont les créances sont nées après le dépôt de la déclaration ne pourront pas saisir le patri- moine familial et personnel de l'entrepreneur.
S'agissant des créanciers professionnels antérieurs au dépôt, l'entrepreneur pourra leur opposer la déclaration d'affectation à deux conditions : l'EIRL mentionnera cette opposabilité aux créanciers antérieurs dans la déclaration et les créanciers seront personnellement informés de la déclaration d'affectation et de leur droit de former opposition (conditions à determiner par décret).
Quant aux créanciers non professionnels, leur garantie est le patrimoine non affecté de l'entrepreneur et le bénéfice du dernier exercice comptable clos si le patrimoine personnel ne suffit pas pour couvrir les dettes.
Responsabilité de l'EIRL
Pour ses dettes professionnelles, la responsabilité de l'EIRL est limitée à son patrimoine affecté.
Mais en cas de fraude ou de manquements graves à ses obligations comptables, fiscales et sociales et en cas de non-respect des modalités d'affectation du patrimoine, cette limitation de responsabilité ne joue plus, et le paiement des dettes sociales et fiscales de l'EIRL pourra être obtenu sur la totalité de son patrimoine.
Séparer les comptes bancaires
L'EIRL devra obligatoirement ouvrir auprès d'un établissement de crédit au moins un compte bancaire qui sera utilisé exclusivement pour son activité professionnelle ayant un patrimoine affecté.
Source. Loi 2010-658 du 15 juin 2010,